jeudi 5 février 2009

Notes Liminaires

"Je ferai donc mon panégyrique moi-même, c'est parfois assez édifiant et souvent assez drôle, car il m'arrive de m'attribuer des mots qui sont en général d'Alphonse Allais, et des aventures puisées dans la vie des hommes illustres."
Antoine Delafoy, neveu (adoptif, et pas —encore— flingué)

Je ne sais pas écrire.

Je veux dire, tu vois, enfin, bref, quoi, je ne sais pas exprimer clairement, bellement, de façon non-péremptoire mais définitive, des choses intelligentes, ou encore, poser des avis pertinents et lumineux à la fois, que le lecteur lira, copiera, rajoutera dans son del.icio.us pour re-lecture ultérieure.
Non, moi, je brouillonne, je tournicote, je poussive, je méandrise, j'habille, je travestis, je vocabularise un peu, mais au final, j'inflige à la langue française une torture peu méritée.


Je ne tiens pas la pose. Pas longtemps.

J'entends, je ne suis pas vraiment capable de postures courageuses, de pétitions de principe par provocation, de grands élans lyriques pour la postérité, montrant mon meilleur profil et m'offrant tout à la fois à la hargne des foules et à l'admiration de la duchesse de Chevreuse. Je ne sais même pas si je suis réac. Qualificatif, qui semble-t-il devient un titre de gloire, dont je ne me sens pas le droit de me parer. (Comme le disent d'aucuns, l'action, plutôt que la réaction ?)


Je n'ai rien à dire. Ou pas plus que ma concierge.

On l'aura bien noté, j'abuse déjà un peu trop de la citation, cette ressource élémentaire du bachelier ou du prépa laborieux, lequel aura appris quelques bons mots, et tente, ainsi que son professeur de philosophie ou de culture-gé lui a enjoint de faire, de les placer opportunément, pour faire office de garantie culturelle et prétendre à une apparente richesse de références. (Ou, soyons modernes, technique de l'internaute qui sait utiliser Google et se souvient vaguement d'une bribe de truc rangé dans un coin de sa mémoire, mais sans les détails ni la tournure exacte).
Et je fais des phrases trop longues, j'ai déjà perdu au cours de ce paragraphe trois lecteurs sur les quatre que m'a prêté le généreux et désinvolte Plusse de la Fromagerie.


Je suis sans intérêt pour vous.

Ma femme pense le contraire —loués soient son innocence et ses grands yeux amoureux— ; mes douze ou treize enfants n'admirent que moi —leur père, ce machin grandiose, qui sera emporté un jour par un cancer des poumons— ;
mes amis veulent encore bien picoler un peu en ma compagnie —on parle du monde qu'il fait et du temps qu'on vit, on est plutôt d'accord, et le vin est souvent bon— ; mes patrons semblent tolérer ma fantaisie professionnelle et une motivation aléatoire, sans doute grâce, ou à cause, de mon charme benêt.
Mais, c'est là tout l'auditoire bienveillant dont je saurais me targuer.


Internet n'a sans doute pas besoin de moi.

Certes, pas plus que de ces deux millions (deux millions ?) de semi-blogues bouseux hébergés par une radio jeune et rappeuse, qui contribuent à la descente aux enfers de la jeunesse, en entraînant avec elle, et la langue française, cette tepu, et la discrétion, cette demi-vertu.

En plus, je suis un peu égotiste, sur les bords, et au milieu, et tout autour (bien sûr, s'il s'agit d'une introduction personnelle, il serait difficile à l'auteur de ces lignes d'éviter de parler de lui; si au moins il savait être un peu marrant, bon sang. On s'emmerde quoi).


Mais.

Mais, moi aussi, je veux exister ?
Je veux peut-être mon quart d'heure de célébrité Warholienne (ou de dandy, au choix), je veux sans doute me poser sur une page, réagir, noter les choses, tenir un journal, être lu, avoir des bacquelinques, être cité, me voir piquer mes postes dans des aggrégateurs douteux, etc. Ou encore, je veux aussi fréquenter ce beau monde d'autres chroniqueurs, que je lis passivement, et que je crois connaître, comme ma concierge, justement, connaît Clotilde, S.A.R. princesse de Savoie, etc. , parce qu'elle là vu dans le poste ou dans PlusPrès magazine...


Alors, pourquoi ?

Je craindrais de n'être qu'une chambre d'écho oiseuse, si je me contentais de reprendre des postes bien tournés, écrits par des gens plus malins et plus vifs que moi (et en plus ce serait juste pour dire "moi pareil !"), ou de simplement citer des faits, des évenements, que d'autres déjà ont repris dans un fil de nouvelles ou via des notes d'actualités, juste pour s'en outrer encore et bien conclure d'un air entendu que le monde eh ben ma brave dame, hein, on est d'accord, ça va pas fort...



Si vous avez tenus jusqu'ici, infortunés égarés de la toile dite "réac" (qui d'autre aurait échoué ici, hein ? Ah, par la magie de Google ? Et bien, à vous aussi, pardon, asseyez vous là, attendez, je dois avoir un petit truc frais pour vous), sachez que je suis ici pour, sans ordre apparent, et en abusant du retour à la ligne, et de la virgule, si française :

- voir combien de temps mes petites pensées posées sur le ternette tiendront avant que blogger-point-com ne me fasse déménager (syndrome victimaire du minoritaire rebelle, je sais je me soigne)

- parler, comme, et à côté, des autres, ou un peu pas pareil, pour causer dans le poste moi aussi, et dire que je suis d'accord, un peu, beaucoup, pas du tout, quels-crétins-mais-bon-ils-me-font-rire. Sur cette grande cibi mondiale de la machintrucosphère.

- répondre, discuter avec des gens qui semblent intelligents et sympathiques, et avec qui on irait volontiers au troquet refaire le monde.

- me mettre à l'épreuve aussi. Si je pense, je dis; si je dis, je tiens; si je tiens, je reste. Ce sera déjà ça.

- et parfois, aussi, parler, de ma voix ; quand j'aurai entendu, vu, lu, ou pensé à quelque chose que personne encore n'aurait relevé ou exprimé comme je le sens. Ce sera, je le crains, rare. Tant mieux pour vous.

- témoigner, en somme.


Anonymement ? Hmm.
"Témoigner anonymement": un oxymore peut-être (sauf à la tévélision sur france-un).
Ah, flûte, oui, là, peut-être, je me suis coincé tout seul. (je suis pas fort en philosophie et en raisonnement intelligent.)
Je vais réfléchir, je reviens vite. Je vais trouver.

En attendant, à gauche, on a de la bonne compagnie.
Et, deux minutes, je vais aussi chercher un tire-bouchon, j'ai égaré mon couteau suisse.

(Ce billet, un exercice de style à l'introduction à l'auteur, sera sans doute effacé très vite, les Souffrances du jeune Werther n'ont d'intérêt que parce que Goethe savait les narrer. Et encore.)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Bienvenue dans ma taule. Ici on parle parfois fort, mais toujours bien, et la courtoisie comme l'amitié sont bien perçues. On essaie aussi de ne pas tomber sous le coup de la loi même si c'est tentant.
Repos, vous pouvez fumer.